[A lire _ pour la richesse du texte et la réflexion qu’il pose sur l’intelligence émotionnelle]
De quoi parle ce roman ?
Une équipe de chercheurs réussit à accroitre l’intelligence d’une souris (Algernon) et décide de tester son expérience sur un attardé mental (Charlie). On assiste à la fulgurante progression de ses capacités mentales, à tel point que ses connaissances finissent par dépasser celles des plus brillants scientifiques. Pourtant, même avec un Q.I surdéveloppé, ces derniers ne cesseront de le considérer comme un simple cobaye sans tenir compte de ce qu’il peut ressentir. Car en devenant intelligent, Charlie devient aussi lucide sur la façon dont le monde l’a traité jusqu’à présent. Il réalise que ce qu’il prenait pour de la camaraderie était de la moquerie ; et qu’aujourd’hui encore on le voit comme une espèce à part, et non comme un être humain doté de sentiments.
« L’intelligence est l’un des plus grands dons humains,
mais trop souvent la recherche du savoir chasse la recherche de l’amour ».
Mon avis sur ce livre
Parlons d’abord de la signification du titre ou plutôt de l’interprétation que j’en fais. Pour moi, il m’évoque la devise d’Armand Marquiset qui a fondé plusieurs associations visant à lutter contre l’isolement. Une vision qui s’illustre dans cette interrogation qu’il a lancé : « Avons-nous donné des fleurs avant le pain ? » Une simple phrase par laquelle il exprime l’importance du lien social. La nécessité d’apporter de l’affection et de faire entrevoir une parcelle de beauté (les fleurs) qui prime sur l’aide matérielle (le pain). Sa vision a résonné en moi après avoir refermé Des fleurs pour Algernon. Ce roman est porteur d’un message fort : on peut faire tout ce qu’on veut pour aider les plus démunis à s’enrichir (intellectuellement ou financièrement) si l’on en oublie les relations humaines alors ce qu’on fait perd de sa portée. L’importance du comment (on fait les choses) qui prime sur le quoi (le but recherché).
Après avoir lu la dernière ligne de ce récit qui fait près de 300 pages (sur les 540 au total) je me suis rendu compte que c’était loin d’être fini. Eh bien oui, j’avais entre les mains l’édition augmentée qui comprenait 240 pages additionnelles. Imaginez, vous êtes arrivé au bout de l’histoire mais le marque page indique que vous avez à peine dépassé la moitié du livre. Naît alors un double sentiment : l’envie d’en savoir plus, et l’impatience de passer à la lecture suivante. Le premier l’a emporté et je me suis aventurée sans grandes attentes dans la suite. À savoir : la genèse de ce texte et le processus de création et d’édition de l’auteur. Verdict ? C’était passionnant ! Sous la forme d’un essai accessible, Daniel Keyes décortique son texte et relate tous les refus qu’il a essuyés avant d’être enfin publié. D’abord sous forme de nouvelle (texte original à retrouver à la fin du livre) puis en roman en 1966. Je dois vous dire que j’ai rarement été aussi emportée par les notes d’un auteur. Des fleurs pour Algernon a pris une toute autre dimension à mes yeux après lecture de ces explications. Je vous recommande donc l’édition augmentée pour aller plus loin dans votre réflexion.
Pour qui ?
Tout le monde, même ceux freinés par l’aspect Science-Fiction. Ce texte est souvent rangé dans ce rayon en librairie mais avec notre regard d’aujourd’hui il aurait presque sa place dans la littérature blanche. Paru en 1966, à l’époque de telles expérimentations scientifiques paraissaient inconcevables et de la pure SF. Aujourd’hui je n’en suis plus très sûre.
À propos du livre
540 pages aux éditions J’ai Lu | Paru en 1966 en anglais | Traduit en 1972 en français
Note: le roman fait 300 pages, l’explication de sa genèse par l’auteur en font 200, et la nouvelle originale fait 40 pages.